Étienne Geoffroy Saint-Hilaire, manuscrit de tératologie
Étienne Geoffroy Saint-Hilaire (Etampes, 1772/1844)Manuscrit d'Étienne Geoffroy Saint-Hilaire. Il contient la seconde partie du chapitre intitulé "Sur la nomenclature", de son célèbre ouvrage de tératologie Philosophie anatomique : Des monstruosités humaines (Paris, 1822). Il est ici question des êtes nés sans cerveau, et des termes nouveaux pour qualifier les particularités des monstres. Ratures, corrections et ajouts.
"Ayant ainsi ramené la monstruosité du podencéphale à consister uniquement en une réunion hétérogène d’organes d’âges et de développemens différens, où la rangera-t-on dans la classification enseignée dans les écoles ? Parmi les anencéphales ? Il le faudra bien, et l’on y est contraint : car c’est bien moins un acéphale, selon la nouvelle acception de ce terme. Et c’est ce que je vis en effet pratiquer, le 28 août dernier, à l’Hotel-Dieu : médecins, professeurs de clinique, élèves, ['tous s'y donnèrent là nouvelle de la' biffé] je les entendis tous se donner, dans les mêmes termes, la nouvelle qu’il venait de naître un fœtus anencéphale.
Et quoi ! il seroit un anencéphale, un être sans cerveau, ce monstre où nous venons d’observer un cerveau simplement retardé dans l’ordre des developpemens, un cerveau veritablement normal au fond !
Avant la réforme de la nomenclature, on n’eût pas été exposé à faire ainsi usage d’expressions démenties par les faits ; on eût annoncé cette naissance sous la désignation d’un fœtus acéphale, sans que ce pût devenir amphibologique. Personne ne s’y serait mépris, et chacun eût seulement entendu, sous cette qualification, un fœtus irrégulier par la privation d’une ou de plusieurs parties de sa tête.
La cause de ce désordre est manifeste. On s’est trop pressé : la nomenclature n’a pas suivi les faits, mais les a précédés. Les mots sont facilement inventés dans le cabinet ; les faits, au contraire, ne s’acquièrent que par un travail opiniâtre et persévérant.
Heureux encore quand cette création intempestive de mots n’est qu’une surcharge pour la science, comme dans un article récent, intitulé : Anatomie d’un chien cyclope et astome (1). On a voulu dire : Chien à un seul œil et sans bouche. Pour le mot syclope, il est devenu français ; mais à quoi bon la forme insolite du second qualificatif ? […] Mais on y a manqué l’observation du fait fondamental, en prenant les deux caisses de l’oreille, soudées ensemble, pour la mâchoire inférieure […] ». Il cite en référence Magendie et évoque le médecin et anatomiste néerlandais Eduard Sandifort (1742-1814).
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