Belle lettre de travail de Claude Simon
Claude Simon (Tananarive, 1913/2005)Passionnante et longue lettre de Claude Simon, adressée à Leo Peeters, relative à ses travaux littéraires :
"[...] Je n'ai guère le temps (je repars dans quelques jours pour la Scandinavie pour une tournée de conférences) de répondre longuement à vos questions. Voici, en bref :
Question 1 - a- ligne AA' : relisez la page 94 de Nouveau Roman : hier, aujourd'hui : lorsque Histoire commence, le narrateur est couché dans son lit et il se retrouve au bout d'à peu près 24 heures (deux fois le tour du cadran) à son point de départ. / b- Sinusoïdes = thèmes, fantasmes et souvenirs obsessionnels. / c- à vous d'en faire le recensement / d- même chose
Question 2 - Je vous répondrai ce que j'ai répondu à Georges Raillard lorsqu'il m'a posé, après son intervention, la même question : certaines des constructions et certaines des combinaisons qu'il a vues dans Femmes ont été conscientes de ma part et très concertées, d'autres non. Ce qui pose d'ailleurs un problème assez passionnant : ce texte ayant été très travaillé est-ce que l'écrivain ("homme traversé par le travail" selon l'excellente définition qu'en donne Jean-Claude Raillon) ne trouverait ou ne retrouvait pas (et que ce soit consciemment ou non n'a aucune importance) certains patrons, ou modèles, ou type de construction (par exemple "grille formelle à douze cases") qu'un lecteur attentif peut y détecter par la suite et analyser ? (Ceci est d'autant plus troublant que le brouillon d'Histoire comptait quinze chapitres, nombre que j'ai réduit (ou plutôt qui s'est réduit) à douze, non par un goût plus ou moins superstitieux ou ésotérique pour ce chiffre, mais à la suite de ratures et de tâtonnements, simplement parce que je sentais confusément que la première version était mal fichue et que quelque chose y clochait [...]".
Au sujet du travail de l'auteur : "ce qui est important et ce qui seul compte c'est ce qui se trouve dans le texte qu'il a produit".
Il évoque ensuite le colloque Robbe-Grillet, Georges Raillard, Merleau-Ponty et ses cours au collège de France relatifs aux romans de Simon, etc.
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