Lettre d’Enfantin à Morelet de la commission d’exploration scientifique de l’Algérie
Prosper Enfantin (Paris, 1796/1864)Intéressante lettre du Père Enfantin sur l'Algérie, adressée à son ami Pierre-Théodore Morelet, également membre de la commission d'exploration scientifique de l'Algérie.
"Carette m'écrit que vous étiez devenu indifférent à l'Algérie et je lui répondais que vous paraissiez l'être sous d'autres rapports, et voilà que le jour même où partait ma lettre, je reçois la vôtre toute amicale et toute algérienne ; cela m'apprendra à ne pas juger trop vite un homme qui n'aime pas à aller très vite mais qui arrive toujours, comme vous nous en avez donné mille fois la preuve". Il s'inquiète de sa santé et l'invite à lever sa pudeur.
De son côté, Enfantin est "à peu près rétabli, en ce sens que depuis huit à 10 jours que j'ai pris des pilules d'Ipéca-calomel-opium" après avoir contracté la dysenterie en Algérie. "Vos résolutions de travail me donnent bonne idée de votre santé, & je vois avec grand plaisir que l'Algérie vous touche plus que vous ne l'aviez écrit à Carette [...].
Il évoque une chasse aux "coquilles" infructueuse, en robe de chambre dans son jardin et le voyage de Morelet en Chine [d'où il rapportera de rares bivalves] : en effet, Morelet était féru de malacologie et possédait à Dijon un riche cabinet de coquilles terrestres et lacustres. "Contre votre ordinaire, vous prévoyez l'avenir de loin, et votre amour des coquilles vous fait tomber dans les habitudes des prophètes. Candie dans deux ans! Sera-ce l'époque de notre départ pour la Chine par la mer Rouge et à travers l'Océanie? Allah Kérim! [...]. Pourtant, il faut bien le dire, nous avons maintenant, vous et moi, un nouveau moyen de songer l'un à l'autre, qui, en bonne santé, doit être quotidien comme le pain du Seigneur. Je ne suis pas si brave que vous et ne puis pas encore faire des projets de travail ; je vis au jour le jour comme une brute [...]".
Il revient sur le sujet de l'Algérie : "l'Algérie me tient toujours vivement au coeur et fortement à la pensée". Il évoque nombre de leurs collègues de la mission scientifique : Pellissier de Reynaud (et sa brochure), Ravergie, Kolb, le départ de Carette pour Tunis, et évoque "trois travaux" de Worms, Duvivier, Varnier et Urbain "qui donnent enfin des idées justes sur la propriété algérienne [...]".
Quelques mois plus tard, Enfantin fera publier Colonisation de l’Algérie (Paris, Bertrand,
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