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Alexandre Dumas propose à Méry de faire élever la sculpture monumentale du Napoléon de Bartolini sur la promenade du Prado à Marseille

Alexandre Dumas (père) (Villers-Cotterêts, 1802/1870)
Romancier et auteur dramatique.

Type de document : lettre autographe signée

Nb documents : 1 - Nb pages : 3 - Format : In-8

Lieu : Sans

Date : vers 1840

Destinataire : [Joseph Méry (1797-1866), romancier et dramaturge]

Etat : bon ; rabas de l'enveloppe collée au dos

Description :

Superbe lettre d'Alexandre Dumas à son grand ami Joseph Méry, au sujet de la statue colossale de Napoléon, oeuvre du sculpteur italien Lorenzo Bartolini, qu'il propose, par son intermédiaire, et à l'occasion du "retour des cendres", de faire installer sur la promenade du Prado, à Marseille.

"Très cher, vous savez que notre Bartolini, je dis notre, car il est bien plus français qu'italien puisqu'il est élève et grand prix de notre école, avait reçu en l'an 1811 l'ordre de Napoléon de faire pour la chambre de commerce de la ville de Livourne, qui était alors l'un de nos ports, une statue colossale de lui, qui devait être élevée sur la grande place :

1814 vint arrêter l'oeuvre commencée : Bartolini abandonna dans son atelier de Florence la statue ébauchée, et alla mettre ses ciseaux aux ordres de l'ex maître du monde, qui était devenu un des plus petits souverains de l'Italie : il resta quatre mois à l'île d'Elbe. Au 20 mars, Bartolini reprit sa statue : il espérait comme nous tous, en un avenir pareil au passé, le canon de Waterloo lui fit tomber le ciseau des mains.

Il n'y avait pas moyen de suivre Napoléon à Ste Hélène, comme il l'avait suivi à l'île d'Elbe, il n'y avait plus espoir de voir l'aigle traverser l'Atlantique comme il avait fait de la Méditerranée : Bartolini détourna les yeux de sa statue, et se mit à chercher dans le marbre, toute cette grande famille de Dieux, de Rois et d'hommes de génie qu'il en a tirés depuis. 1830 le surprit, au milieu de sa genèse, et comme il séparait, la forme de la matière : la statue du marbre, la vie du néant.

Alors il releva le voile dont il avait couvert son oeuvre de prédilection : 1830 achèverait peut être ce qu'avait commencé 1811 ; en effet, chose étrange, le premier mot que prononça en se réveillant la Liberté fut le nom de Napoléon : c'est qu'elle avait cessé de le craindre et que celui qu'elle avait eu pour maître, comme les anciens César, s'était fait Dieu en mourant. Bartolini se remit à son oeuvre.

Aujourd'hui il ne faut plus à cette oeuvre que quatre mois de travail : trop colossale pour être transportée à Paris, sa statue ne peut être offerte qu'à quelqu'une de nos villes méridionales, et Bartolini a pensé à notre Marseille (je dis notre Marseille comme j'ai dit notre Bartolini) comme à une seconde capitale [...]. Croyez vous que Marseille pour sa belle promenade du Prado par exemple voudrait par souscription acquérir le Napoléon colossal de Bartolini : il y ajouterait 3 bas reliefs qui lui seraient indiqués par le Conseil municipal et qui se rattacheraient soit à l'histoire de la vieille, soit à l'histoire de la nouvelle Phocée.

Alors Marseille, au retour des cendres de Napoléon, pourrait avoir sa fête impériale comme Paris aurait la sienne.

C'est à vous, mon cher Méry, de faire murir cette belle idée dans les esprits de vos compatriotes et d'effacer la dernière trace du reproche que Tacite faisait aux Phocéens, d'être plus aptes aux choses du commerce qu'aux choses d'art".

Vendu