Pour Eugène Marsan, la vie d’écrivain est une perpétuelle déception.
Eugène Marsan (Bari, 1882/1936)En plein travail, Eugène Marsan s'interrompt pour livrer le fond de sa pensée au sujet de l'échec de l'édition du roman de son ami, intitulé "Jean Lamy", dont il le tient pour responsable. "Vous avez écrit partout, vous avez fait savoir à son de trompe, que vous étiez prêt à faire les frais de l'édition. C'est fini : vous ne trouverez plus, en ce moment, à le faire éditer autrement. Voilà le châtiment de votre précipitation et de votre hâte. Vous me savez hostile à ce genre d'édition. Un jeune auteur peut faire éditer à ses frais une brochure, une plaquette de vers, une fantaisie. Il n'a pas le droit de donner ainsi un roman, une longue nouvelle, sous une forme, en ce cas, trompeuse. En outre, ça ne sert à rien, parce que tout le monde le sait. Il ne vous reste pour Jean Lamy que deux solutions" : soit faire imprimer un petit nombre d'exemplaires pour ses amis et la critique ou "2° Attendre. Le tiroir. Pas le feu. Le feu est bête. Il ne vous apprend rien. Vous serez content de revoir votre Lamy dans cinq ou dans dix ans [...]. Sachez pour finir que notre métier a pour première vertu la patience, que la vie d'un homme de lettres est une perpétuelle déception, et qu'il y faut être fort, très fort, affreusement fort. Tâtez vous bien, pour savoir si le coeur vous en dit... A votre prochain voyage, je vous montrerai un tiroir plein de manuscrits où j'avais mis comme vous en Lamy ma confiance et mon espoir. Ils sont là comme des fleurs fanées..."
Vendu