Belle lettre de l’amiral Baudin relative à la guerre de succession portugaise, en 1833
Charles Baudin (Sedan, 1784/1854)Lettre de l'amiral Charles Baudin, signée "Chr", écrite de la rade de Lisbonne. Elle est adressée à son "cher Auguste" [il pourrait s'agir d'Auguste Baudin (1800-1877), officier de marine et futur gouverneur du Sénégal et de Guyane].
Belle lettre sur la situation au Portugal au moment de la guerre civile et du blocus de Lisbonne.
"[...] Tu te rappelles sans doute que, décidé à rentrer dans mon ancienne carrière [il fut commerçant au Havre, mais fit faillite] et libéré enfin des liens de devoir qui m'avaient si longtemps enchainés au Havre, j'étais venu me mettre à la disposition du Roi et du ministre. J'avais reçu l'assurance du premier commandement vacant dans la Méditerranée et déjà je m'occupais d'expédier mon bagage à Toulon, tout plein de l'espoir de te revoir [...]". Il explique les circonstances de sa nomination à Cherbourg, évoque la venue du Roi à Cherbourg, ainsi que de sa femme et ses enfants, puis en vient à la situation au Portugal où il est appelé. "Le jour même où le Roi a quitté Cherbourg, j'ai reçu l'ordre de venir prendre ici le commandement de notre station navale : les circonstances étaient alors graves : on craignait en France que Mr de Beaumont qui s'était mis à la tête des forces de Don Miguel ne parvint à reprendre Lisbonne. Heureusement il n'en a rien été et ma mission s'en est trouvée de beaucoup simplifiée. Cependant, tout est loin d'être fini en Portugal, malgré la levée du blocus de Lisbonne. Don Pedro est maître de la capitale, d'une petite partie du territoire voisin, et des principales villes maritimes ; mais tout l'intérieur du pays est à Don Miguel ; et, ce qu'il y a de plus surprenant c'est que les coeurs de la masse des Portugais sont à lui. C'est que Don Miguel, ce monstre de vice et de cruauté, qui n'a pas un sentiment humain, a su flatter le clergé et les moines qui gouvernent l'opinion. Au contraire, Don Pedro, bien supérieur à son frère, sous le rapport des lumières et de la modération, a blessé le Pape par le renvoi de son nonce, le clergé par l'abolition des dîmes, les moines par la suppression d'une partie des couvents. Ce sont tous des actes d'une haute impolitique de la part de Don Pedro qui a ainsi irrité le peuple contre lui, tandis que d'autres mesures ont mécontenté la noblesse. Ayant ainsi contre lui la grande majorité des trois ordres de l'état, il ne se soutient que par l'appui des étrangers et cependant il a la sottise de les maltraiter […]".
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