Relation des funérailles nationales et de la panthéonisation de Victor Hugo
Longue lettre d’un jeune homme à ses parents, signée "A. Aillaud?" [peut-être le parolier Théodore Alexandre Aillaud (1859-1917)?], relatant les funérailles nationales de Victor Hugo, auxquelles il venait d’assister la veille, le 1er juin 1885.
« C'était hier le grand jour de deuil pour Paris, on transportait le corps de Victor Hugo au Panthéon. Vous dire l'affluence de monde est impossible, toute personne valide était sur pied ; on a estimé la quantité de curieux à 2 millions et le cortège à 1 million c'est vous dire que tout Paris assistait aux funérailles. Les écrasements ne se comptaient pas étant donné la cohue formée principalement à l'intersection des rues. Il a fallu pour maintenir la foule à certains moments la faire repousser par les municipaux à cheval, comme en employant ce procédé là on est sûr d'avoir la place dégagée, les personnes refoulées s'entassant sur celles placées derrières elles il s'en est suivi pas mal d'évanouissements chez les femmes et des pieds écrasés chez les deux sexes. Pour résumer mes impressions je dirai que c'était splendide ; je ne crois pas qu'on ait jamais fait de funérailles pareilles ou qu'on en fasse jamais à n'importe quel personnage. Il pourra y avoir plus de pompe, par exemple au lieu du corbillard des parures, au char magnifique comme celui de Gambetta, mais jamais tant de monde, de fleurs, et un enthousiasme si vif. La tête du cortège est partie à 11 heures de l'arc de Triomphe et la queue n'est arrivée qu'à 7 heures au Panthéon. On a calculé à quelle somme s'élevait l'argent dépensé pour les couronnes et on l'a estimée à 4 millions, aussi que de belles fleurs que de couronnes splendides, il y en avait qui mesuraient jusqu'à 8 mètres de diamètres. C'était réellement féérique, cependant j'ai trouvé que par moments cela touchait un peu à la cavalcade ; je n'ai pas approuvé par ex : les applaudissements de la foule pour certains groupes ; je comprends que l'on admire mais pas des marques d'enthousiasme qui sont plus que déplacées en pareille circonstance […] ». Il décrit un char de jeunes filles vêtues de blanc et de couronnes de fleurs blanches, les soldats présents, etc.
Beau témoignage de cet évènement national.
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