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Stéphane Mallarmé : « je me suis éperdument baigné dans vos déchirures vierges à horizon »

Stéphane Mallarmé (Paris, 1842/1898)
Poète français.

Type de document : lettre autographe signée

Nb documents : 1 - Nb pages : 7 pp. - Format : In-12

Lieu : Paris, 89 rue de Rome

Date : 18 juin 1888

Destinataire : J.-H. Rosny (Les frères Boex)

Etat : Pliure centrale

Description :

Très belle lettre de Stéphane Mallarmé, inédite, adressée à J.-H. Rosny (pseudonyme commun des frères Joseph Henri Honoré Boex (1856-1940) et Séraphin Justin François Boex (1859-1948), relative à leur ouvrage Marc Fane, paru en 1888.

"Mon cher Confrère,

J'ai eu le courage de garder, y flairant du rare et du nouveau, votre livre, pour quelques jours à moi projetés dans la verdure et la paix. Voici mon retard à vous remercier.

Marc Fane est une oeuvre inattendue, et la plus d'aujourd'hui. Vous avez créé des originaux, dont le type certainement est épars, mais doit être : j'ai senti pour la première fois des Contemporains vivre, ou des gens d'aucun temps, terrestres, respirant à même les phénomènes, car l'éclat retardataire de la science n'aura d'autre effet que de nous rendre primitifs, lavés au jour électrique et démomifiés. A part cela, la miraculeuse candeur à quai atteint votre regard, dans une crise d'enfance élargie jusqu'au savoir, quel délice et que de puissance ! Je vous en parle sans suite, avec l'incohérence qui marque une émotion spirituelle vive, dans ce billet ; mais un jour que nous causerons, vous verrez que (situé juste au contraire, et croyant ramener toute l'âme à un vieux dogme mal connu en tant que les Lettres, sans jouissance directe de la nature, mais figurative et consciente), je me suis éperdument baigné dans vos déchirures vierges à horizon, affranchi de toute obsession personnelle. Et puis c'est si cordial et [?] hilarant, une surprise plénière, décisive, claire comme celle-là ; quoique je vous aie lu de côté et d'autre attentivement ces derniers temps. Merci de n'avoir pas douté, me l'envoyant, de la sympathie qu'éveillerait oeuvre pareille chez votre dévoué [...]".

Un texte anonyme, paru dans le Supplément littéraire du dimanche du journal Le Figaro, le 19 mai 1888, décrit l'ouvrage de Rosny, écrit à quatre mains, par ces mots :  "Marc Fane, fils de J.-H. Rosny. Le tome II du Bilatéral, roman qui fit à l'auteur une jolie place parmi les lettrés. Marc Fane, étude d'un cerveau de sociologue, tout pétri de tendresse et d'humanité consolée, Marc Fane, c'est le Rosny connu, dissertant à perte de respiration sur les mondes découverts dans une bouchée de pain ou dans les globules ramassés au centre d'une tasse de café ; sur les rêves ou sur l'astronomie ; fort capable d'interrompre une polémique pour tâter la boîte osseuse de son contradicteur, peser ses aliments et expliquer le régime qu'a du suivre M. Zola pour perdre 32 livres !".

Encre noire sur deux doubles feuillets de papier vergé filigrané "Veritable English Fashion".

Vendu