Le chanteur Juliet, témoin de la concurrence entre Théâtres Favart et Feydeau.
Antoine Juliet (Juillet dit) (Paris, 1755/1825)Lettre du chanteur Antoine Juliet, évocatrice de la concurrence entre le Théâtre Favart (opéra-comique) et celui, nouveau et à proximité, de la rue Feydeau, qui connait sous la Révolution un grand succès mais est aussi frappé, à plusieurs reprises, d'interdiction de représentation. Juliet a noté en haut de la lettre : «Copie de la lettre que j'ai écrite au citoyen Dufaÿsse pour la Compagnie Portarieu». Juliet refuse de rembourser l'argent qui lui a été alloué par la compagnie Portarieu, alors gérante du Théâtre Feydeau, au moment où il était fermé ; il s'agissait pour lui, non pas d'un prêt ou d'une avance, mais bien d'une indemnité due à l'immobilisation. «A l'époque de la faillite de la Compagnie Lebeau, il me fut fait, ainsi qu'à un autre camarade, la proposition de m'engager au Théâtre Favart, à des appointements de dix huit mille francs par an, dont trois mille furent déposés chez Pérignon notaire, qui peut attester de la vérité du fait. Des offres aussi avantageuses, et qui devenaient d'autant plus certaines que le genre de l'opéra comique étant entièrement disparu de Feydeau allait revivre d'une manière plus avantageuse à celui de Favart ; la compagnie Portarieu sentit tellement ce désavantage pour elle, qu'elle fit tous ses efforts pour empêcher la conclusion de cette affaire, et que vous fûtes, monsieur, le principal agent qui me dissuada de contracter l'engagement qui m'était proposé au Théâtre Favart ; vous me fites même part de votre projet de réunir ces deux établissements à celui de Feydeau, et vous me fites espérer que j'y serais traité d'une manière avantageuse. Je vous fis la promesse de vous seconder de tout mon pouvoir, tant, parce que cette affaire était pour vos intérêts, que parce qu'elle me laissait l'espoir de rappeler à cette réunion, mes infortunés camarades de Feydeau, mais sous l'observation cependant que mes besoins particuliers et ceux de ma famille exigeaient que je me procurasse les fonds nécessaires à notre existence, jusqu'à l'époque de cette réunion à venir, qu'en conséquence puisque je ne m'engageais point aux Italiens, je projettais d'aller faire une tournée en province [...]. Il s'écoula plus de trois mois pendant lesquels je reçus successivement jusqu'à la concurrence d'une somme de 3600# et à chaque payement qui m'était fait, il m'était de nouveau certifié que ce n'était ni une avance ni un prêt que m'a fait la compagnie [...]». [En 1801, sur ordre de Bonaparte, alors Premier consul, la troupe Feydeau fusionnera avec celle de l'Opéra-Comique, qui doit abandonner la salle Favart, trop vétuste ; l'ensemble est rebaptisé Théâtre national de l'Opéra-Comique].
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